Aroles: la limite alpine des arbres n’est pas uniquement déterminée par le climat

03.07.2017  |  News

Les températures en hausse contraignent de nombreuses espèces montagnardes de plantes et d’animaux à coloniser des altitudes supérieures. Pourtant, la progression vers les hauteurs ne dépend pas uniquement du climat, comme l’ont découvert des scientifiques de l’Institut Senckenberg et de l’Institut fédéral de recherches WSL. Dans le cas de l’arole, ce sont bien davantage les interactions écologiques qui déterminent où s’installent les jeunes pousses, et donc jusqu’à quelle altitude la limite alpine des arbres sera repoussée à l’avenir.

Sous l’influence du réchauffement climatique, de nombreuses espèces d’animaux et de plantes sont attirées par des régions plus fraîches, que ce soit vers des latitudes plus élevées ou vers les sommets. Les plantes, moins mobiles que les animaux, ne pourront pas réagir à la même vitesse que celle des changements environnementaux. Ces difficultés n’épargnent pas l’arole (Pinus cembra), une essence caractéristique des Alpes, dont des individus isolés marquent souvent la limite alpine des arbres.

On pensait jusqu’ici que cette zone de transition entre les derniers arbres et la végétation alpine était surtout déterminée par le climat. Mais la réalité est plus compliquée, comme le montre une étude de la Senckenberg Gesellschaft für Naturforschung et de l’Institut fédéral de recherches sur la forêt, la neige et le paysage WSL. «Le climat n’est qu’un cadre pour l’établissement de l’arole. La progression de cette espèce par dissémination de graines vers des régions d’altitude plus élevée dépend avant tout des interactions avec d’autres plantes et également d’animaux, notamment le casse-noix moucheté», explique Eike Lena Neuschulz, du centre de recherches sur la biodiversité et le climat Senckenberg, auteure principale de l’étude. «Nos recherches montrent que les interactions écologiques peuvent avoir une grande influence sur la présence et l’extension de certaines essences», ajoute Felix Gugerli, de l’Institut fédéral de recherches WSL.

 

Les plantes et animaux déterminent la progression de la limite supérieure de la forêt

Pour atteindre des altitudes plus élevées, les graines d’aroles, qui ne sont pas transportées par le vent et sont difficiles d’accès, ont besoin d’un transporteur, dans ce cas le casse-noix moucheté. Mais celui-ci reste fidèle à la limite des arbres actuelle, et ne transporte en général que peu de graines vers des altitudes supérieures. Il dissimule la plus grande partie de ses réserves de graines aux altitudes moyennes des forêts d’aroles. C’est ce qu’ont déterminé des études scientifiques à une altitude située entre 1850 et 2250 m dans deux vallées à proximité de Davos.

L’équipe y a documenté pendant trois ans le rajeunissement de la forêt d’arole ainsi que les conditions environnementales locales. De plus, les scientifiques ont enterré 360 graines d’arole pour observer leur germination. «C’est l’environnement direct qui déterminera si l’une des quelques graines ayant réussi à dépasser la limite actuelle des arbres deviendra réellement une jeune pousse. Une végétation buissonnante basse est favorable, et les rongeurs qui s’attaquent aux graines rendent impossible leur germination», résume Eike Lena Neuschulz. Les scientifiques ont été étonnés de constater que, contrairement à ce qui était admis jusqu’ici, les facteurs climatiques comme la température moyenne et l’humidité du sol sont moins importants lors des premières années de croissance.

La forêt d’arole menacée en tant qu’écosystème

L’étude indique que certaines essences comme l’arole ne pourront pas, ou très lentement, s’adapter aux futures modifications climatiques de leur environnement. «Si le climat se réchauffe, et que la concurrence avec des essences en provenance d’altitudes moins élevées augmente, ces interactions écologiques complexe devraient être bouleversées. Ainsi, le milieu naturel que constitue la forêt d’arole, caractéristique de nombreuses régions des Alpes, pourrait être menacé», analyse Felix Gugerli. «Ce serait un véritable problème, car cette forêt est un environnement de haute montagne important dans les Alpes : sa diversité écologique est élevée, et elle contribue à la protection contre les dangers naturels», résume Eike Lena Neuschulz.

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