Des pins dans la vapeur d'eau: une expérience de grande envergure explore la sécheresse de l'air et du sol en forêt

28.08.2024 | Beate Kittl/Marcus Schaub | WSL News

Des scientifiques de l'Institut fédéral de recherches sur la forêt, la neige et le paysage WSL et de l’EPFL pulvérisent de la vapeur d'eau dans les cimes des pins adultes du Bois de Finges, en Valais. Cette expérience de grande envergure doit permettre de dissocier les effets de la sécheresse du sol et celle de l'air sur les arbres forestiers dans le contexte du changement climatique. L'expérience est présentée aujourd'hui mercredi aux médias.

Depuis le début de l'été, un phénomène étrange se produit dans le Bois de Finges en Valais: une multitude de buses montées sur des échafaudages pulvérisent de la vapeur d'eau à haute pression dans les cimes de pins sylvestres hauts d'une douzaine de mètres. Cette installation fait partie de VPDrought, une expérience unique au monde qui vise à dissocier les effets de la sécheresse du sol et celle de l'air dans un écosystème forestier naturel. 

La vapeur d'eau augmente l'humidité de l'air. Une technique sophistiquée utilise des buses à haute pression pour atomiser l'eau en minuscules gouttelettes qui s'évaporent si rapidement qu'elles ne mouillent ni les arbres ni le sol.

Financé par le Fonds national suisse, le WSL, l'EPFL et le SwissForestLab, ce projet a pour objectif de comprendre comment chaleur et sécheresse affectent la résilience des forêts et quels sont les processus qui conduisent à la mort des arbres.

En effet, le climat deviendra plus chaud et plus sec, comme c'est déjà le cas aujourd'hui en de nombreux endroits du Valais. Et les conséquences se font déjà sentir: en Valais ainsi que dans les vallées sèches intra-alpines voisines (région d'Innsbruck, Basse-Autriche, sud de la Styrie, Vintschgau, vallée d'Aoste), les pins sylvestres meurent et des chênes, plus tolérants à la sécheresse, prennent leur place. Depuis 21 ans, le WSL étudie les processus responsables de ces dépérissements dans le Bois de Finges. Chaque nuit, certaines parties de cette pinède sont irriguées afin de comparer les arbres soumis ou non au stress dû à la sécheresse.

L'air «assoiffé» aggrave le manque d'eau: un cercle vicieux

Le changement climatique introduit aujourd'hui un nouveau paramètre environnemental inquiétant: l'augmentation de la «soif de l'air». Plus l'air est chaud, plus il peut absorber d'humidité. En conséquence, l'atmosphère réchauffée extrait davantage d'eau des plantes et des sols. Cette «soif» est appelée déficit de pression de vapeur, en anglais vapor pressure deficit (VPD).

Le VPD est un facteur déterminant de la quantité d'eau que les arbres évaporent par les feuilles ou les aiguilles, et a donc une grande influence sur l'approvisionnement en eau et le refroidissement des arbres. Avec le réchauffement climatique, le VPD augmente exponentiellement. Des valeurs de VPD élevées entraînent une forte évaporation, ce qui peut provoquer un stress hydrique chez les plantes. En plus des effets directs sur la physiologie des plantes, un VPD élevé accélère l'évaporation des sols, créant ainsi un cercle vicieux d'assèchement des sols, de réchauffement de la surface terrestre et de stress hydrique pour les plantes.

Qu’est-ce qui est pire, la sécheresse du sol ou celle de l’air?

Ce qui est exceptionnel dans VPDrought, c'est que cette expérience étudie l'influence de la sécheresse de l'air et celle du sol dans une forêt naturelle adulte. Pour ce faire, les pins sylvestres âgés d'environ 130 ans reçoivent différentes quantités d'eau du sol: soit la quantité naturelle de pluie d'environ 600 mm/an, soit le double (1200 mm/an) grâce à l'irrigation, soit seulement la moitié des précipitations naturelles (environ 300 mm/an) grâce à des toits.  D'autre part, des buses à haute pression diffusent de la vapeur d'eau dans une partie de la canopée pendant la journée. Cette vapeur d'eau réduit le VPD – la «soif» de l'air – d'environ 20 à 30 pour cent.

Les études sont menées de l'échelle de la cellule végétale jusqu'à celles de l'arbre et de l'écosystème. L'expérience a débuté en 2024 et se poursuivra jusqu'en 2028. Les résultats seront disponibles dans les prochaines années.

Un VPD croissant – c'est-à-dire un air toujours plus «assoiffé» – est un défi à la fois pour l'agriculture et pour les forêts. Les mesures continues et ponctuelles de plus de 100 paramètres au niveau de l'arbre et de l'écosystème doivent permettre de comprendre comment la sécheresse de l'air et du sol affectent les processus métaboliques et la résilience des forêts face à la sécheresse. Ces connaissances contribuent à l'amélioration des modèles climat-végétation et sont intégrées dans les futures stratégies de sylviculture et le choix des essences d'avenir.

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VPDrought: Une nouvelle approche pour dissocier les effets de la sécheresse de l'air et du sol en forêt


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