Concepts d’aménagement pour les élargissements

L’élargissement du lit majeur des cours d’eau peut être pratiqué sur une seule rive ou sur les deux. De façon générale, on peut supposer que les fleuves et rivières élargis bilatéralement pourront développer une dynamique plus importante que ceux qui ne le sont que d’un côté. D’autre part, l’occupation de l’espace supplémentaire par le cours d’eau peut prendre davantage de temps dans le cas des élargissements unilatéraux.

Les différents concepts d’aménagement se distinguent par le degré d’intervention humaine:

Evolution spontanée

L’aménagement consiste simplement à démanteler les ouvrages de stabilisation des berges. L’élargissement de l’espace occupé par le milieu fluvial est ensuite obtenu par érosion latérale par la seule dynamique naturelle du cours d’eau. Sa progression se fait en dépendance totale des évènements hydrologiques naturels ; selon le régime des crues, elle peut donc prendre plusieurs années. Certaines observations soulèvent d’autre part un autre problème : il s’avère en effet que les rivières à tendance érosive conservent un tracé stable pendant plusieurs années c'est-à-dire qu’elles n’occupent pas l’espace mis à leur disposition et ne modifient pratiquement pas leur morphologie suite à un élargissement du lit majeur.

Au début du processus de transformation morphologique, aucune stabilisation des rives n’est tout d’abord assurée afin de permettre leur érosion naturelle. Il est donc impératif de procéder à une surveillance permanente de l’évolution du site pour être en mesure, le cas échéant, d’intervenir pour éviter une érosion latérale excessive par la construction d’ouvrages ou de dispositifs correcteurs. La méthode d’alerte faisant appel à des lignes d’intervention et d’évaluation ou de discussion prédéfinies a déjà prouvé son efficacité. Son principe est le suivant : Lorsque la rive atteint une ligne d’évaluation tracée sur la carte, un groupe de discussion se réunit pour décider si des mesures s’imposent déjà ou si le cours d’eau peut continuer de se développer. Si l’érosion latérale progresse encore et atteint une ligne d’intervention tracée plus en retrait, un programme de mesures d’aménagement décidées par avance est immédiatement mis en œuvre.

A la sortie de l’élargissement, l’écoulement doit être impérativement recentré vers le chenal d’origine par le biais d’ouvrages construits à cet effet.

Ouvrages directeurs
à la limite inférieure de l’élargissement

Evolution spontanée avec mesures visant à initier la dynamique fluviale

Comme dans le cas du concept d’évolution spontanée précédemment décrit, le travail de transformation du lit est entièrement fourni par le cours d’eau lui-même. Ici, cependant, l’amorce du déplacement des chenaux et de l’extension du lit est stimulée par des mesures ciblées (abaissement des berges, création d’îlots par déversement de galets et graviers etc.), ce qui permet d’obtenir assez rapidement des changements morphologiques visibles et la formation de nouveaux habitats alluviaux. Du point de vue de l’« écologie », c’est la stratégie la plus appréciée.

Pour l’application de cette stratégie, il est à nouveau conseillé de mettre en place un système de surveillance de l’érosion latérale comme celui faisant appel aux lignes de discussion et d’intervention afin de prendre le cas échéant les mesures correctrices qui s’imposent.

Aménagement mécanique de l’élargissement

Dans le concept d’aménagement mécanique de l’élargissement, l’extension latérale du lit est entièrement provoquée par la réalisation de travaux de génie civil et l’intervention d’engins de chantier. Pour éviter une érosion latérale supplémentaire généralement indésirable, les berges sont stabilisées par des ouvrages.

Comme dans les autres types d’élargissement, il faut ici aussi veiller à maintenir dans le lit les alluvions qui s’y trouvent. Un prélèvement de matériaux solides ne ferait qu’aggraver le problème déjà sérieux du déficit sédimentaire des cours d’eau et compromettrait la stabilisation voire le rehaussement du fond visés par les travaux d’élargissement. De plus, les cours d’eau à tendance érosive forment plus rarement îlots et ramifications. Certaines observations montrent qu’en cas de déficit sédimentaire, la rivière conserve en général un chenal unique et non ramifié même si son espace de liberté a été suffisamment accru.

Citation:
Rohde, S., Cosandey, A.-C., Hunzinger, L., Junker, B., Marti, C., Requena, P., Vogel U., 2005: Integrales Gewässermanagement. Erkenntnisse aus dem Rhône-Thur Projekt. Synthesebericht Gerinneaufweitungen. Eawag, WSL, LCH-EPFL, VAW-ETHZ. 69 pp.